Les masques Guèlèdè, patrimoine vivant inscrit à l’UNESCO

Les masques Guèlèdè, patrimoine vivant inscrit à l’UNESCO

Depuis 2008, les masques Guèlèdè figurent sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO.

À la fois spectacle, rituel et outil de régulation sociale, le Guèlèdè incarne l’une des expressions les plus sophistiquées et profondes de la culture yoruba-nago, notamment chez les peuples du Bénin, du Nigeria et du Togo.

Au-delà de l’esthétique et du folklore, il s’agit d’un système symbolique complexe, mêlant spiritualité, satire, mémoire collective et cohésion sociale.

Les masques Guèlèdè, patrimoine vivant inscrit à l’UNESCO

Une tradition portée par les femmes, représentée par les hommes

À l’origine du Guèlèdè se trouve un principe fondamental. Celui d’honorer le pouvoir spirituel et social des femmes-mères (appelées awon iya wa en yoruba), à la fois génitrices, initiatrices et gardiennes de l’ordre moral.

Cette tradition reconnaît que la stabilité de la communauté dépend du respect dû aux femmes, en particulier aux aînées, considérées comme détentrices d’une énergie mystique appelée « ase ».

Cependant, ce sont les hommes initiés qui incarnent les esprits à travers la danse masquée, généralement sur les grandes places du village ou dans les cours royales.

Le Guèlèdè se manifeste ainsi comme un rituel de médiation. Les hommes empruntent le langage symbolique des masques pour transmettre les messages des femmes-mères, conciliant les dimensions visibles et invisibles du monde.

Les masques Guèlèdè, patrimoine vivant inscrit à l’UNESCO

Une mise en scène complexe qui mêle art, satire et rituel

Les cérémonies Guèlèdè s’organisent en deux temps principaux, la sortie de nuit (Efe), souvent plus satirique, et la sortie de jour, plus solennelle.

Chaque masque est associé à un costume, une musique, un chant et une chorégraphie spécifique. Le spectacle débute avec des tambours appelés bata, suivis des chants oriki (louanges) et de l’entrée des masques sur la scène.

Les masques eux-mêmes, sculptés en bois et souvent peints de couleurs vives, présentent une structure singulière, une coiffe surmontée d’une scène figurative, représentant parfois un couple, un animal, une scène de vie ou une critique sociale. Ils véhiculent ainsi des messages éducatifs, moraux ou politiques.

Les performances sont souvent marquées par une liberté de parole inhabituelle, permettant aux masques d’aborder des sujets tabous ou de critiquer des comportements déviants.

 En cela, le Guèlèdè fonctionne comme un espace de régulation sociale, où l’humour et la symbolique remplacent la sanction directe.

Les masques Guèlèdè, patrimoine vivant inscrit à l’UNESCO

Le Guèlèdè : un outil d’éducation…

Le Guèlèdè ne se limite pas à une simple démonstration artistique. Il est un outil d’éducation intergénérationnelle, un lien entre les ancêtres, les vivants et les générations futures.

Il permet de transmettre les valeurs sociales fondamentales notamment le respect des anciens, la solidarité, la justice, la loyauté et le travail collectif.

Les jeunes sont initiés dès l’enfance à cette culture ; ils apprennent les rythmes, les chants, la sculpture des masques, les gestes codifiés.

L’apprentissage ne se fait pas seulement par imitation, mais aussi par immersion dans le tissu social et rituel de la communauté.

Le Guèlèdè est aussi un facteur d’identité culturelle fort pour les communautés concernées. Il soude les membres d’un même groupe autour d’un patrimoine commun, en renforçant la mémoire collective.

Les masques Guèlèdè, patrimoine vivant inscrit à l’UNESCO

La reconnaissance par l’UNESCO : un enjeu de sauvegarde et de valorisation

En inscrivant le Guèlèdè au patrimoine culturel immatériel de l’humanité, l’UNESCO a reconnu l’importance de préserver une tradition vivante, fragile et porteuse de sens.

Cette reconnaissance a permis de stimuler des efforts de documentation, de formation et de transmission.

Au Bénin, des festivals comme celui d’Abomey ou de Kétou mettent en valeur ces rituels, en lien avec les maisons de culture, les musées et les écoles.

Des actions communautaires sont également menées pour éviter la marchandisation du Guèlèdè ou son appauvrissement symbolique face aux exigences touristiques.

Cependant, la pérennité du Guèlèdè repose avant tout sur les communautés elles-mêmes, qui doivent continuer à l’ancrer dans leur quotidien, sans le figer dans une vision muséale ou folklorique.

L’enjeu est donc de maintenir l’équilibre entre transmission fidèle et adaptation aux mutations sociales.

Enfin, retenons quele Guèlèdè est une preuve éclatante que les cultures africaines précoloniales sont riches de systèmes de pensée, de formes artistiques et de mécanismes sociaux complexes.

Il montre comment un rituel peut jouer un rôle dans la résolution de conflits, l’éducation, la critique politique et la valorisation du féminin sacré.

À l’heure où les sociétés modernes cherchent de nouveaux modèles de gouvernance communautaire, d’inclusion et de respect des diversités, le Guèlèdè suggère une leçon précieuse : «  la culture n’est pas un décor, elle est un levier de transformation sociale. »

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